Voici le premier de deux articles qui traitent des indications récemment fournies dans le cadre de notre processus d’enquête déontologique concernant les conflits d’intérêts. Le prochain article sera publié dans l’infolettre de mai 2025.
Scénario
Vous poursuivez une demande de marque de commerce pour le compte du(de la) client(e) B. Vous avez déjà représenté le(la) client(e) A dans le cadre d’une demande de marque de commerce. Une marque enregistrée ou une marque figurant dans une demande de marque de commerce en instance du(de la) client(e) A est relevée dans le cadre de la demande de marque de commerce que vous poursuivez pour le(la) client(e) B. Ce scénario donne-t-il lieu à un conflit d’intérêts vous obligeant à vous retirer de l’affaire du(de la) client(e) B?
Code de déontologie
Pour examiner toute question de conflit d’intérêts, il faut tout d’abord prendre en compte les indications fournies dans le Code de déontologie.
Le principe directeur de la partie 3, qui porte sur les conflits, apporte la précision suivante :
Dans tous les cas, le jugement de l’agent et sa loyauté à l’égard des intérêts du client doivent être libres de toute influence compromettante.
La règle 3 de la partie 3 énonce les facteurs dont les agent(e)s doivent tenir compte lors de l’analyse de conflits d’intérêts, notamment :
- si les intérêts des clients sont immédiats;
- si les intérêts des clients sont directement contraires;
- la relation temporelle entre les dossiers;
- l’importance de la question pour les intérêts immédiats et à long terme des clients en question;
- les attentes raisonnables du client lorsqu’il engage l’agent pour l’affaire ou la représentation en question.
Le commentaire de la règle 6(1), Agir contre d’anciens clients, fournit aussi des indications supplémentaires :
Cette règle interdit à l’agent de remettre en question le travail effectué durant la représentation ou de miner la position du client au sujet d’une affaire qui était importante dans le mandat. Il n’est pas inapproprié que l’agent agisse contre un ancien client dans une toute nouvelle affaire n’ayant aucun lien avec les tâches que l’agent a accomplies auparavant pour ce client si les renseignements confidentiels obtenus antérieurement sont non pertinents pour cette affaire.
Analyse
Nous pouvons maintenant nous pencher sur la situation en question à la lumière de ces règles. Compte tenu des facteurs que les règles nous demandent de prendre en considération, chaque analyse de conflit d’intérêts se rapporte étroitement aux faits. L’évaluation des risques de conflit dépendra d’autres renseignements factuels. Pour évaluer le scénario hypothétique décrit ci-dessus, il serait utile de s’appuyer sur les réponses aux questions suivantes :
- Le(la) client(e) A est-il(elle) l’un(e) de vos client(e)s actuel(le)s?
- La marque de commerce citée du(de la) client(e) A est-elle toujours en vigueur, ou la demande connexe est-elle toujours en cours?
- Êtes-vous ou étiez-vous concrètement responsable de la demande de marque de commerce citée ou de sa poursuite pour le compte du(de la) client(e) A?
- Avez-vous déjà été en possession de renseignements confidentiels concernant la marque de commerce citée? Par exemple, avez-vous seulement assumé la responsabilité de la gestion des taxes de maintien en état après l’enregistrement ou la délivrance de la marque de commerce?
- Avez-vous connaissance de projets du(de la) client(e) A visant à faire valoir ses propres droits de marque de commerce à l’encontre du(de la) client(e) B relativement à l’affaire en question?
Conclusion
Selon le scénario ci-dessus et les circonstances factuelles pertinentes :
-
- Lorsqu’un(e) agent(e) est ou était l’agent(e) enregistré(e) qui a poursuivi à la fois la marque de commerce citée du(de la) client(e) A et la demande en instance du(de la) client(e) B, si l’agent(e) conseille le(la) client(e) B sur ses droits relativement à la marque de commerce du(de la) client(e) A, il existe un risque substantiel que son obligation de loyauté envers le(la) client(e) A soit affectée.
Autrement dit, lorsqu’un(e) agent(e) est ou était l’agent(e) enregistré(e) qui a poursuivi à la fois la demande citée du(de la) client(e) A et la demande en instance du(de la) client(e) B, il est possible que le dénigrement de la demande du(de la) client(e) A porte atteinte aux obligations de l’agent(e) envers le(la) client(e) A, bien que son incidence sur le(la) client(e) A puisse être fortement hypothétique. - Si un(e) agent(e) n’a pas poursuivi la demande de marque de commerce du(de la) client(e) A, mais entretient une autre relation avec le(la) client(e) A, il peut y avoir un conflit d’intérêts commercial, mais peut-être aucun conflit d’intérêts juridique ou éthique.
- Si l’enregistrement de la marque de commerce du(de la) client(e) A a expiré ou si sa demande est devenue caduque pour des raisons non liées à la représentation du(de la) client(e) B par l’agent(e), il semble moins probable qu’il y ait un conflit. Cependant, le(la) client(e) A pourrait toujours utiliser sa marque non enregistrée, ce qui pourrait tout de même porter atteinte à la capacité du(de la) client(e) B à utiliser ou à enregistrer sa marque de commerce. Selon la relation entre l’agent(e) et le(la) client(e) A, il peut aussi y avoir un risque de conflit d’intérêts juridique. Autrement dit, si la demande du(de la) client(e) A a expiré ou est devenue caduque pour des raisons non liées à la représentation du(de la) client(e) B par l’agent(e), la probabilité d’un conflit d’intérêts éthique semble moindre.
- Lorsqu’un(e) agent(e) est ou était l’agent(e) enregistré(e) qui a poursuivi à la fois la marque de commerce citée du(de la) client(e) A et la demande en instance du(de la) client(e) B, si l’agent(e) conseille le(la) client(e) B sur ses droits relativement à la marque de commerce du(de la) client(e) A, il existe un risque substantiel que son obligation de loyauté envers le(la) client(e) A soit affectée.